Panne d’ascenseur dans le social

Depuis 2015, un sujet me trotte dans la tête. J’ai commencé à mettre en forme mes idées en 2017 et ces idées ont pris la forme d’un essai. Mon ami Bernard Legros a bien voulu écrire la préface, et l’éditeur Libre et solidaire a été intéressé par mon projet, qui est paru le 30 mai 2019.

Je soutiens les librairies indépendantes faces aux GAFAM, et soutient cette sélection de livres pour réfléchir sur l’Amazonie.

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Véritable métaphore, ce texte dénonce les déviances de notre société qui laisse en chemin les personnes les plus fragiles sous prétexte de modernité.

En 2002, dans un quartier ouvrier de Strasbourg, le petit Bilal, un enfant de 4 ans, chute dans une cage d’ascenseur et décède. Cet accident très médiatisé, à l’origine de la loi de Robien, nous interpelle sur l’état de notre société.

Le progrès technologique est-il vraiment accessible à tous ? L’ascenseur, solution de notre société moderne, est-il supérieur à l’escalier, solution « économique » ? À travers ce parallèle, c’est tout le concept de « progrès » qui est remis en question. Cette parabole décrit un système social qui augmente les inégalités entre les classes, les privilégiés d’une part et les laissés-pour-compte d’autre part, ce fossé se creuse de plus en plus engendrant frustrations et suscitant le rejet de notre système politique.

Cet ouvrage nous invite à refuser ce faux progrès, à changer nos références culturelles, notre regard sur le monde et sur nous-mêmes, et surtout à modifier notre comportement, le temps presse…

Les croyances – Cas pratique n°2 : Le développement durable

Je cite Pablo Servigne et Raphaël Stevens dans le Kairos d’avril/mai 2017.

Les énergies renouvelables viendront nous sauver du déclin des combustibles fossiles et du changement climatique; les robots et autres objets connectés à travers de gigantesques serveurs nous aideront à mettre en place une économie collaborative, soutenable et harmonieuse; ou au pire, la colonisation de Mars dans un futur pas si éloigné permettra à une petite partie de l’humanité d’échapper à la catastrophe écologique !

Laissons la dernière proposition délirante pour les lecteurs boutonneux de Science et Vie, ou pour les amateurs de films futuristes paranos américains tels que Interstellar. Nous n’avons pas de planète de rechange. C’est une limite.

Laissons la deuxième proposition (robots) pour les techno-scientistes un peu naïfs. L’économie capitaliste « dure » ne tolère pas beaucoup les formes « douces » d’économies. Il n’y a qu’une économie, qui détruit ou récupère toute initiative innovante ou marginale.

Détaillons la première proposition très largement répandue, du développement durable : les énergies renouvelables, le changement climatique, les générations futures…

Il suffit de regarder le film « Sans lendemain » pour comprendre que malheureusement les énergies renouvelables ne pourront pas nous permettre de remplacer les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon, nucléaire…).

Le changement climatique, nous y sommes déjà : les glaciers ont fondu, il n’y a plus de neige en hiver, nous assistons à une alternance de chaud et de froid très inquiétante… Évidemment, il y a toujours des journalistes imbéciles pour se réjouir de la chaleur et des ventes de glaces au bord du lac d’Annecy fin octobre.

Tout le débat sur le carbone, sa mesure obsessionnelle sur les sites de transport ou de vente de bagnoles, cache une mesure beaucoup plus complexe : celle de l’empreinte écologique.

 

 

 

 

 

Les « générations futures » : c’est un terme honteux. Ils ne sont pas encore nés, c’est une abstraction qui nous dédouane. Si nous disions plutôt : « Nos enfants » : ils sont vivants, et nous avons la responsabilité de les accueillir et de les protéger.

Le développement ne peut pas être durable à l’infini : allons-nous continuer de construire indéfiniment des immeubles, des villes, des autoroutes ? Allons nous vivre avec des robots, nous greffer des pièces robotiques, ou remplacer les humains par des robots ?

Le développement durable, c’est la désastreuse écologie qui pue des pieds mise à la sauce glamour de l’économie de marché, de l’économie de croissance infinie dans un monde fini. C’est une fausse-barbe, un déni, pour se voiler la face face à la réalité.

Il est très difficile d’admettre que la réalité contredit nos rêves de toute-puissance. Nous, occidentaux, avons rêvé d’un monde meilleur. Au lieu de cela, nous avons exterminés les amérindiens et les indiens du Sud, nous avons exterminés les éthiopiens et bien d’autres, fauchés comme les blés tendres (Churchill). Nous avons importé la guerre coloniale en Europe et cela a débouché sur deux horreurs successives : 14-18 et les « déserteurs » en ESPT, le choix de la défaite et la débâcle française, le maréchal Pétain et les nombreux camps français (Drancy, Struthof, Les Milles…).

Nous nous sommes consumés dans le consumérisme, devenue une nouvelle religion : chacun réclame son « saut de puce en avion pour manger une pizza à Naples pour 30 euros, aller/retour dans la journée ».

Qui peut poser une limite à un tel délire ? Les consommateurs ? Les politiques ? Ou les seuils écologiques franchis ou en passe d’être franchis, provoquant sans doute les changements importants annoncés par le rapport Meadows ?

Nos problèmes ne sont pas économiques ou écologiques : ils sont avant tout conceptuels. La pensée chrétienne est viciée depuis longtemps. Le sort que nous réservons aux animaux est catastrophique, parce que nous ne pouvons plus nous penser comme des animaux. Le sort que nous réservons au monde est catastrophique parce que nous le considérons comme notre « environnement » duquel nous sommes comme détachés.

Les catastrophes à venir ne seront pas forcément catastrophiques pour nous, les humains. Elles seront par contre catastrophiques pour l’économie, la finance, les infrastructures.

Et elles seront bénéfiques pour l’harmonie entre les vivants.

Les croyances – Cas pratique n°1 : L’athéisme au Niger

Comme nous allons sans doute avoir besoin de nous adapter à des changements importants dans les prochaines décennies, il nous faudra nous préparer, nous éduquer, et malaxer profondément nos systèmes de croyance. Voici ma contribution, avec cette nouvelle série d’articles.

Il semble que les humains ne peuvent pas vivre sans croyances. Nous constatons également que des croyances fortement ancrées aident les humains à dépasser les épreuves de la vie, en leur permettant de constituer une vision de l’avenir avec de l’espoir : la possibilité d’un scénario favorable lorsque tout semble perdu (décès, cancer, séparation, etc.). Même si une croyance peut être mise en question, voire être admise comme erronée (par exemple l’existence du père noël), celui qui croit ne peut pas supporter que sa croyance soit remise en cause. C’est le principe du déni, une forme de défense psychique. Si l’individu constate que la réalité confronte fortement sa croyance, soit il s’enferme dans le déni, soit il doit entamer un long et couteux processus de mise à jour de cette croyance, qui passe souvent par un état dépressif (Cf. les étapes du deuil de E. Kubler-Ross).

Prenons quelques exemples et analysons ces cas pratiques.

Cas pratique : L’athéisme au Niger

Un ami relatait une anecdote vécue au Niger, pays très pauvre et sans doute très musulman. Son hôte nigérian et musulman lui demande s’il croit en Dieu ; il répond qu’il est athée, qu’il ne croit pas en Dieu. Son interlocuteur lui dit : « Ah, vous êtes catholique ! ». Notre ami insiste : « Non, non, je ne crois en aucun Dieu ! ». Son hôte nigérian lui répond, avec un grand rire : « Ah, ah, qu’est-ce que vous êtes drôle ! ».

Notre ami comprend qu’il n’y a rien à faire : inutile d’insister. La prochaine étape pourrait être d’obtenir la colère de son hôte, ou de mettre celui-ci en difficulté, l’hospitalité étant incompatible avec l’expression de la colère.

Que pouvons-nous déduire de cette histoire ? L’hôte Nigérian croit au Dieu de la religion musulmane : Allah. Il fait sans doute preuve d’ouverture puisqu’il accepte l’idée qu’il soit possible de croire en un Dieu différent, le Dieu des Chrétiens. Mais il est impensable dans son système de croyance que quelqu’un puisse ne pas croire en un Dieu. Il cherche donc à ranger l’information de son interlocuteur « Je ne crois en aucun Dieu » dans des cases disponibles : « Il est catholique », puis comme cette case ne fonctionne pas, il la range dans une autre case : « Il fait de l’humour ». Si notre ami athée insistait, les cases suivantes pourrait être : « C’est un provocateur, il se moque de moi », puis « Il est fou, je n’ai plus besoin de l’écouter ».